Un jour, après les cours, Béatrice proposa à ses amies d'aller se détendre au parc d'attractions tout près de l'université. C'était une belle journée, ensoleillée, idéale pour s'amuser et relâcher un peu la pression des examens.
Une fois arrivées, l'excitation se lisait sur tous les visages. Elles achetèrent chacune une glace – vanille pour Béatrice, fraise pour Chelda, chocolat pour Fleurette – puis se dirigèrent vers les premiers manèges.
— On commence par quel jeu, les filles ? s'écria Fleurette, les yeux brillants d'impatience.
— On joue au carrousel ! proposa Chelda en pointant du doigt un manège coloré aux airs féeriques.
— D'accord, allons-y ! répondit Béatrice en souriant.
Elles firent un premier tour sur le carrousel "Chevaux Enchantés", dont les montures semblaient galoper dans les airs sous une musique joyeuse. Puis elles enchaînèrent avec les montagnes russes "Dragon Volant", où les cris de joie et de peur se mêlaient au vent, et continuèrent par un passage sur la grande roue "Œil au Ciel", d'où la vue sur tout le parc leur coupa le souffle.
Elles traversèrent ensuite la zone futuriste "Futur X", décorée de néons et d'un immense robot interactif, puis plongèrent dans l'univers de "Pirates au Crépuscule", une reconstitution de navire en bois où des comédiens costumés les saluèrent à la manière des flibustiers. Elles terminèrent leur parcours dans la "Forêt féerique", un sentier magique aux champignons lumineux et au sol brumeux, où l'on se serait cru dans un rêve.
Fatiguées mais heureuses, les filles achetèrent du maïs soufflé au caramel et des bubble teas colorés qu'elles sirotèrent en riant aux éclats. Le soleil commençait déjà à décliner ; il était temps de rentrer.
Sur le chemin du retour, alors que Béatrice dégustait une énorme barbe à papa, quelqu'un la bouscula violemment par accident. Sa friandise tomba au sol.
— Aïe !
— Désolé…
— Encore toi ?! s'exclamèrent-ils en chœur, stupéfaits de se retrouver face à face.
— Pourquoi m'as-tu bousculée ? lança-t-elle, agacée.
— Pourquoi es-tu toujours sur mon chemin ? répliqua-t-il froidement.
— C'est toi qui me suis ! C'est pathétique !
— Moi, te suivre ? T'as perdu la tête ou quoi ?
— Présente-moi des excuses.
— Quoi ?
— Tu viens de me faire perdre ma barbe à papa ! Tu ne crois pas que tu devrais t'excuser ?
— Bien. Au revoir.
— Hé ! Tu vas où comme ça ? Tu dois t'excuser !
— Écarte-toi de mon chemin.
— Excuse-toi d'abord !
— J'ai des choses plus sérieuses à faire. Lâche-moi, gamine.
— Oh ! Gamine ? T'es sérieux là ?
— Ai-je l'air de plaisanter ?
Béatrice baissa les yeux et aperçut un ordinateur dans ses mains. Profitant d'un moment d'inattention, elle le lui arracha des mains et se mit à courir.
— Hé ! s'écria Peter. Rends-moi ça !
Elle sprinta jusqu'au dortoir des filles. Devant l'entrée, un surveillant les arrêta.
— Jeune homme ! Les garçons ne sont pas autorisés ici.
— Elle a pris mon ordinateur ! protesta Peter.
— Tu régleras ça plus tard, jeune homme.
Peter dut s'arrêter là, impuissant. Il resta posté devant le bâtiment pendant des heures, espérant que Béatrice sortirait. Mais elle ne réapparut pas.
---
Le lendemain matin, alors qu'elle se rendait en cours, elle l'aperçut. Peter l'attendait, visiblement de mauvaise humeur. Elle passa devant lui sans lui accorder un regard.
— Hé ! Rends-moi mon ordi !
— On ne t'a jamais appris à dire bonjour ? répondit-elle, sarcastique.
— Peut-être pas.
— Pas étonnant.
— Rends-moi mon ordinateur, Béatrice !
— J'ai cours. Pas le temps pour ta scène inutile, gamin.
— Tu plaisantes ?
— Écarte-toi de mon chemin.
— Rends-moi ce qui est à moi !
— Je suis pressée, laisse-moi passer.
— On ne t'a jamais appris à ne pas voler ?
— Va le chercher si tu peux. Pourquoi tu continues à m'embêter ? T'en as pas marre ?
— Ce n'est pas un jeu. J'ai du travail dessus !
— Et en quoi ça me concerne ?
Elle tourna les talons et s'en alla sans se retourner.
---
Après les cours, Béatrice se promenait à bicyclette pour se changer les idées. Mais rapidement, elle sentit une présence derrière elle… Elle se retourna. C'était lui.
— Encore ce gamin ? soupira-t-elle. Quelle malchance… Il est partout !
Elle accéléra. Lui aussi. Béatrice tourna dans une ruelle étroite, pensant le semer, mais Peter, en essayant de suivre, perdit le contrôle de son vélo et chuta bruyamment.
Entendant le bruit, Béatrice ralentit.
— Dois-je aller voir… ou le laisser là ? se murmura-t-elle.
Mais en voyant la silhouette au sol, elle soupira et s'approcha. Peter tentait de se relever, grimaçant.
— Pourquoi t'es-tu retournée ? C'est pas ce que tu voulais ? ironisa-t-il.
Elle lui tendit la main.
— Tiens.
— Qu'est-ce que c'est ?
— Regarde.
— C'est pas nécessaire. Merci.
— Prends-le, insista-t-elle.
Elle lui glissa un mouchoir dans la main.
— J'ai dit que j'en voulais pas. Tu ne comprends pas ?
— Pourquoi es-tu aussi têtu ? Tu refuses même de t'excuser quand tu as tort. Tu préfères me suivre et tomber comme un idiot ?
— Et en quoi ça te regarde ?
— Tu m'as coûté une barbe à papa. Alors pourquoi je m'en soucierais pas ?
— Enfantin.
— C'est toi, l'enfantin.
— Quand vas-tu me rendre mon ordinateur ?
— Quand tu seras sage.
Béatrice tourna le dos et repartit, son vélo à la main. Peter la regarda s'éloigner. Il espérait un dernier regard. Mais elle ne se retourna pas.